|  |  | Récit 
          d'un voyage en Inde. Bengale, Bengladesh,Tripura, Khankal.... premier voyage, troisième livre -
 éditionss 
          Paupières de terre épuisé
 extraits 
          :  « 
          Être ouvert, tellement ouvertque rien ne peut être laissé
 au dehors »
 Anandamayi
 Anandamayi 
          est née à Kéora au Bengale,avant la partition du pays. Je n’arrive pas à savoir si ce village se 
          trouve maintenant
 au Bengladesh ou bien plus à l’est encore, dans la province de Tripura 
          rattachée à l’Inde.
 J’ai regardé sur la carte, la frontière avec le Bengladesh est à trente 
          kilomètres de Calcutta.
 Il suffit de prendre un local train. Je fais la queue pour prendre mon 
          billet. La file est longue.
 Arrivée au guichet, l’employé me dit que je dois faire une autre file, 
          celle pour les femmes
 seules. Je refais la queue. Le train est bondé. Beaucoup de femmes debout,
 beaucoup d’hommes assis. Il fait très chaud.
 Le train roule depuis deux heures, s’arrête souvent. Je me sens mal 
          : la foule, la chaleur.
 Une femme enceinte debout près de moi, crie quelque chose. Quelqu’un 
          attrape
 mon sac à dos qui voyage de mains en mains au dessus des têtes. La femme 
          me pousse,
 un passage s’ouvre entre les voyageurs, une place
 se libère. Ma protectrice au ventre rond est toujours debout. Elle rit.
   Le 
          soir tombe. Le car est monté sur un bac pour traverser le delta du Bramapoutre.Le dos appuyée sur le bastingage, je compte les dizaines de camions 
          qui s’entassent
 avec nous. Des images de naufrage vues à la télévision me traversent 
          l’esprit.
 Des enfants de trois-quatre ans traînent des seaux de boissons fraîches 
          et
 les vendent en riant. J’ai sympathisé avec les deux jeunes garçons. 
          Ils m’expliquent
 gênés qu’ils n’ont pas le droit de parler à une femme européenne. Nous 
          voguons,
 je regarde le fleuve argenté dans la nuit, la lune. Soudain sur l’eau, 
          la flamme
 d’une bougie, une lanterne, une petite voile, une barque minuscule. 
          Le pêcheur
 ne bouge pas. Brume, silence. Deux heures magnifiques viennent de passer.
 De nouveau le car et puis Dakka. Je refuse le grand hôtel proposé par 
          le chauffeur,
 je me retrouve dans une chambre sans fenêtre. J’écrase quelques insectes
 sur le drap taché. Je m’endors –poussin fatigué-dans mon duvet tout 
          propre.
   Le 
          train roule depuis midi. Allongée sur ma couchette, je somnole. Je bois 
          du siropau basilic pour calmer ma toux. Des voyageurs m’invitent à descendre, 
          à partager
 leur pique nique. J’imagine les piments que je vais devoir avaler. Je 
          m’excuse,
 j’explique ma bronchite. Je me rendors. Je me réveille au petit matin.
 Nous avons huit heures de retard. Je m’assois près d’une fenêtre, je 
          bois du tchaï.
 Je ne pense à rien ou peut-être à quelques amis français. Dehors, des 
          marchés,
 des chemins bordés d’arbres maigres, des temples, des mares. Le bruit 
          du train.
 Les voyageurs jettent leurs détritus par terre. Plus tard, un homme 
          vient passer
 un coup de balayette contre quelques roupies. Parfois le train s’arrête 
          longuement.
 Tous les passagers descendent le long de la voie pour se dégourdir les 
          jambes.
 Je reste à ma place de peur de ne pas savoir remonter assez rapidement. 
          J’aimerais
 savoir boire à l’indienne, sans toucher la bouteille ou le verre avec 
          mes lèvres.
 Je profite des arrêts pour m’entraîner. Je m’étrangle ou bien l’eau 
          déborde de ma bouche.
 Les enfants rient, me montrent. En fin d’après-midi, Haridwar station, 
          je descends.
 Je hèle un rickshaw. Une amie m’a prévenue, le prix de la course ne 
          doit pas dépasser 10 roupies.
 Pour Khankal, 10 roupies, c’est d’accord ?
 Non Madame… Pour la moitié, c’est d’accord.
 Le rire et le chargement de mes 25 kilos de bagages sont gratuits.
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